Difficultés financières d’universités européennes

Depuis quelques années, de nombreuses universités sont confrontées à des difficultés financières avec des déficits parfois élevés si bien que certaines pensent à fermer. Analysons rapidement la situation dans quelques pays européens.

En France

Les coûts de formation d’un étudiant tournent autour de 10 000 euros/an alors que les frais d’inscription sont de l’ordre de quelques centaines d’euros. Cette différence s’explique par une décision politique visant à former le plus grand nombre de jeunes et donc à financer grandement les universités. Par exemple, l’Université Clermont Auvergne prévoit un déficit d’environ 10 millions d’euros pour l’année 2024. En France, plus de 60 universités sur 71 risquent de connaître un déficit cette année[1]. De manière générale, ces déficits sont souvent dus à des facteurs comme l’augmentation des coûts énergétiques, les salaires des personnels, et les coûts d’entretien du parc immobilier. Il faut y ajouter la plus grande difficulté à obtenir des subsides européens. Cette situation est la conséquence des baisses de crédits alloués par l’Etat. Après les 900 millions d’euros d’économie demandées aux universités françaises en début d’année dernière, il est question pour 2025 de 500 millions supplémentaires. Une somme à confirmer par le nouveau gouvernement.

En Allemagne

Des universités prestigieuses allemandes comme Heidelberg, Munich, Berlin et Stuttgart voient leur déficit s’élever à près de 4 millions d’euros, alors que les coûts de formation et les frais d’inscription sont similaires à la France. La récession actuelle pourrait entraîner des conséquences néfastes pour les années à venir. Les solutions envisagées sont l’augmentation des partenariats public, et l’alourdissement des frais de scolarité : bien que controversée, une augmentation modérée des frais de scolarité pourrait aider à générer des revenus supplémentaires.

Au Royaume-Uni

Bien que les frais de scolarité varient de 9 000 à 9 250 livres sterling par an pour les étudiants britanniques avec un coût plus élevé pour les autres nationalités, quarante pour cent des universités britanniques sont déficitaires. La faute à un modèle de financement brisé qui repose sur les frais versés par les étudiants et le recrutement d’élèves à l’étranger. Conséquence[2], le secteur multiplie les programmes d’économies. « Environ 70 universités ont procédé à des licenciements, fait savoir John Rushforth, un expert de la gouvernance universitaire. Des cours sont supprimés, voire des départements entiers. » Les universités de Sheffield Hallam et de Portsmouth ont annoncé que 400 postes sont menacés, représentant respectivement 9 % et 11 % de leur effectif. Celle de Coventry a prévu des coupes pour économiser près de 100 millions de livres (près de 120 millions d’euros) d’ici à 2026. D’autres envisagent de fusionner. La prestigieuse université de Cambridge[3] a actuellement un déficit de 53 millions de livres sterling.

Italie

L’enseignement supérieur[4] a été l’un des secteurs les plus touchés par la grande crise de 2008-2009. En effet, les réductions constantes des financements ont fait que, en termes réels, la contribution publique est encore aujourd’hui inférieure à celle d’il y a 15 ans. Pour cette raison les dépenses par étudiant sont de 30 à 40% inférieures à celles des cousins européens. Les universités comme Foggia, Sannio, et Reggio de Calabre sont en difficulté.

En effet[5], cette tendance négative est due à une baisse des résultats de la recherche, dans un contexte de concurrence mondiale croissante de la part d’autres universités plus financées. La position de l’Italie dans le domaine de l’éducation et de la recherche est sous pression en raison de la croissance des systèmes d’enseignement supérieur dans le monde entier ; rien qu’en Chine, les investissements dans la recherche ont augmenté de 33%. Sans investissements publics supplémentaires dans la recherche et le développement, l’Italie risque de diminuer encore ses performances à l’avenir.

En Espagne

Tandis[6] que la rentrée universitaire débute, certaines facultés expriment leurs plus vives inquiétudes quant à leur budget. Selon un syndicat, 60 universités risquent de finir l’année en déficit. Par exemple, l’Université Complutense de Madrid a clôturé l’année 2023 avec un déficit de 65 millions d’euros. Les raisons de ces déficits sont multiples :

  • Réduction des subventions gouvernementales : les universités ont vu leurs budgets réduits par le gouvernement, ce qui a limité leurs ressources,
  • Augmentation des coûts : les coûts liés à la masse salariale, aux infrastructures et aux équipements continuent d’augmenter,
  • Chute des recettes : certaines universités dépendent des frais de scolarité et des revenus de la recherche, qui peuvent fluctuer.

En conclusion

Ainsi, la situation est critique dans beaucoup d’endroits en Europe, avec des conséquences funestes pour la formation des jeunes et d’adéquation au marché du travail. De même, la recherche dont le but est la production de connaissances, pourrait aussi voir des retombées préjudiciables.

Il serait bien que l’Union européenne consacre plus d’argent pour les formations universitaires.

Pour une analyse des frais d’inscription dans d’autres pays, se reporter au rapport Eurydice[7].

En d’autres termes, la compétitivité des économies européennes pourrait être lourdement affectée.


[1] https://www.francetvinfo.fr/societe/education/enseignement-superieur-quatre-universites-sur-cinq-risquent-de-terminer-l-annee-en-deficit-selon-le-snesup-fsu_6788710.html

[2] https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/09/29/au-royaume-uni-certaines-universites-risquent-de-ne-pas-passer-l-hiver_6338294_3234.html

[3] https://www.telegraph.co.uk/news/2024/10/28/cambridge-university-runs-up-53m-debt-without-knowing-why/

[4] https://sapere.virgilio.it/scuola/mondo-scuola/universita-a-rischio-in-italia-le-situazioni-piu-critiche

[5] https://www.ilfattoquotidiano.it/2024/05/13/la-universita-italiane-perdono-competitivita-nel-mondo-la-sapienza-cede-8-posizioni-male-pure-padova-e-milano-la-classifica/7546034/-

[6] https://diplomeo.com/actualite-enseignement_superieur_universites_deficit

[7] https://www.touteleurope.eu/societe/le-cout-des-etudes-superieures-en-europe/

Robert Laurini

Rédacteur-en-chef Professeur émérite en informatique
Picto

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